40 % des jeunes européens préfèrent être au chômage que malheureux au travail (source Arte, janvier 2023). Aujourd’hui, de nombreux secteurs peinent à recruter des jeunes, évoquant la “pénurie de talents”. Certains pensent à un refus généralisé de travailler, à un caprice ou même à un excès de fainéantise. Pourtant, il serait intéressant de se pencher sur les facteurs qui influencent l’opinion des jeunes, comprendre leurs motivations et leurs projets d’avenir. Au-delà des conclusions hâtives, qu’en est-il réellement des jeunes face au travail ?
Le nouveau rapport des jeunes face au travail
Différentes préoccupations à travers le monde
Les jeunes de demain doivent-ils s’épuiser au travail comme leurs parents avant eux, ou au contraire changer les règles ? Par jeunes, on fait référence aux générations Y (née dans les années 90) et Z (de l’année 1997 à 2010).
Suite à la pandémie de COVID-19 qui a rebattu les cartes, de nouvelles questions générationnelles ont vu le jour :
- Le travail doit-il rythmer nos vies ?
- Dois-je me consacrer corps et âme à mon métier ?
- Le temps libre et le bien-être ont-ils leur place sur ma feuille de salaire ?
- Quel rôle le travail doit-il occuper dans ma vie ?
Malgré une concurrence accrue, les jeunes sont en position de force. Ils emportent avec eux une nouvelle façon d’appréhender le travail. À travers le globe, les jeunes parlent d’accomplissement personnel, de reconnaissance ou encore d’ambition que n’ont pas eu leurs ainés. Ils souhaitent retrouver du temps, redonner du sens à leur vie professionnelle.
Les jeunes ne sont pas devenus des “enfants gâtés” qui prennent tout pour acquis. Ils ont désormais conscience de leur valeur. En France et au Royaume-Uni, il n’y a jamais eu autant de démissions que ces dix dernières années. En 2020, en Europe de l’Ouest, 1 jeune sur 5 a claqué la porte de son entreprise. En Irlande et en Angleterre, 50 % des jeunes travailleurs ont prévu de démissionner en 2023. La moitié des jeunes Français, quant à eux, se disent prêts à démissionner s’ils ne peuvent pas télétravailler. 40 % d’entre eux démissionnent pour une question de valeurs (source Arte, janvier 2023).
À l’inverse, en Allemagne, de nombreuses entreprises refusent les apprentis et stagiaires qu’elles jugent trop exigeants et pas assez travailleurs. Six employeurs sur dix estiment d’ailleurs que les jeunes travailleurs manquent de motivation.
Les principales attentes des jeunes au travail
Les jeunes seraient-ils plus sélectifs dans leur approche du travail ? La Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT) joue un rôle majeur sur l’attractivité des métiers. Ce qui prime pour les jeunes, c’est ce besoin de donner du sens au travail. On parle de motivations intrinsèques (comme l’environnement de travail ou la reconnaissance) et de motivations extrinsèques (comme le salaire).
Les jeunes doivent-ils réduire leurs exigences ou les entreprises doivent-elles s’adapter aux nouvelles façons de travailler ? Les jeunes talents d’aujourd’hui ont pris conscience de l’impact du bien-être au travail et de l’importance de l’équilibre vie personnelle/vie professionnelle. Ils ne souhaitent plus porter le poids physique, émotionnel et intellectuel du travail. Pour rester en bonne santé, ils recherchent un environnement de travail sain et un poste épanouissant.
En somme, les jeunes talents ne souhaitent pas travailler moins, mais travailler mieux. Ils se recentrent sur leurs propres aspirations et veulent se sentir respectés au sein de leur hiérarchie. Kaja PAVLINIĆ, vice-présidente du Réseau des Jeunes Croates, évoque d’ailleurs ce besoin des jeunes de “liberté dans l’équilibre, de faire ce qui les passionnent”.
Entreprises : 3 conseils pour retenir les jeunes talents
Offrir un équilibre vie pro/vie perso
L’idée de se sacrifier pour son travail est révolue. Les jeunes travailleurs veulent se sentir utiles, mais pas à n’importe quel prix. Ils insistent sur la transparence et le rejet des pratiques managériales toxiques (pression psychologique, harcèlement, sexisme, discrimination, etc.). Les entreprises doivent se remettre en question pour attirer les jeunes talents.
Favoriser le bien-être au travail
Il ne suffit pas de brandir la pancarte de “jeune entreprise cool et humaine” où les salariés peuvent “se détendre au babyfoot et profiter d’une grande salle de pause toute équipée”. Les attentes des jeunes talents vont au-delà des préoccupations matérielles et des équipements que peut fournir l’entreprise qui les emploie. Elles sont axées sur la réalisation de soi.
Garder de la flexibilité
Dans un contexte de généralisation du télétravail, ce sont ¾ des jeunes de 18 à 34 ans qui souhaitent travailler d’où ils le souhaitent. Ce que l’on nomme “les jeunes” sont des individus très variés qui ont des parcours différents. On ne peut pas parler d’une seule génération uniforme. Un jeune diplômé en informatique, secteur très porteur, aura plus de facilités à faire valoir ses exigences qu’un autre jeune sans formation. Chaque jeune n’a pas non plus les mêmes attentes en matière d’emploi : des situations qui peuvent parfois mener à des tensions sociales.
La valeur travail est toujours présente, mais n’est plus au centre de l’existence des jeunes. Ils ne souhaitent pas prendre le pouvoir et renverser l’ordre établi. Ils aspirent à travailler mieux. Ils veulent exercer une activité porteuse de sens. Les générations Y et Z sont le fruit d’une révolution du travail qui s’opère. De nouvelles ambitions émergent, dont celles de faire entendre sa voix et de prendre part aux décisions qui structurent leur vie professionnelle, et plus globalement, leur avenir.